Si vous êtes vieux, usé, las, déprimé, sans goût et sans vigueur, malade sans espoir de guérir, blessé dans votre chair, dans votre âme, quelle autre issue que l'amertume ou la glissade vers le néant ? Mais il se rencontre des gens ainsi navrés, et qui pourtant sont paix et joie, pour eux-mêmes et pour d'autres. Comment font-ils ? Quelle source ont-ils découverte qui donne cette eau pure ? (…) Ils sont la frugalité même : l'envie avide les a quittés. Ils sont si pauvres que leur parole ou leur sourire est un trésor. Mystérieusement, ils aiment la vie. Ils l'aiment par-delà ce que nous avons fait de nos vies, comme le don de cette présence que la mort même ne détruit pas. Ils sont déjà sur l'autre rive du fleuve d'éternité. Quelle grandeur ! Quelle beauté !
Maurice Bellet
Minuscule traité acide de spiritualité, Ed. Bayard