À force de scruter la nuit, ils ont vu

     Parce qu'ils ont scruté la nuit, ils ont vu : non pas le faux jour des apparences ou du clinquant, dans une agressive impudeur qui prétend tout dévoiler ; mais le somptueux de la nuit, cette ombreuse immensité, vibrante comme un violoncelle, où des cœurs accordés frémissent au battement sourd du cœur caché de Dieu. Le langage de la nuit est fait du bruissement, du frôlement d'innombrables brindilles de silence. Il y faut une oreille exercée et un cœur complice : la nuit ne parle qu'aux âmes pensives et sans orgueil ; elle les lave de toutes les fatigues du jour et pose sur les plus inquiètes la douceur sans partage d'une main de femme. Dans la nuit vigilante des cœurs en éveil, c'est l'à-venir qui s'ouvre et se dévoile.

Paul Baudiquey

Pleins Signes, Ed. du Cerf