Nombreux sont les macarismes (bénédictions) dans la Bible en général, et dans la bouche de Jésus en particulier. Plus rares sont leurs contraires, les malédictions, et l’on peut légitimement se demander si elles correspondent à un vœu de malheur lorsque Jésus les utilise.
On le sait, traduttore traditore, la traduction est parfois le lieu de trahisons. Or l’interjection oy que l’on traduit par « malheur » signifie d’avantage la souffrance, le désarroi, la tristesse. Dire « malheur à vous les riches » ne signifie pas la même chose que « malheureux êtes-vous les riches » ! Maudire (littéralement « dire du mal ») quelqu’un et dévoiler son malheur ne revient pas au même !
Il semble plus conforme à l’attitude de miséricorde du Christ de penser qu’il ait dit « malheureux êtes-vous qui… ». Comment celui qui nous demande de souhaiter du bien à ceux qui nous maudissent (Lc 6, 27) pourrait-il maudire lui-même ? Du reste, Matthieu écrit que Jésus pose un regard d’amour sur le jeune homme dont les grandes richesses l’empêchent de tout quitter pour le suivre (Mt 10, 21). Car Jésus ne condamne pas la richesse en tant que telle, mais ce que l’homme en fait : servir l’argent ou utiliser l’argent pour servir !
L’amour de Dieu est miséricorde et pardon, s’il condamne sans appel le péché il ne condamne pas le pécheur, mais l’invite à un retournement du cœur (une conversion), une prise de conscience de la réalité de ses richesses intérieures. Seul demeure « malheureux » le cœur qui se ferme…